L'hippocampe
et la mémoire cognitive
En
1953, un patient célèbre, H.M., subissait
une ablation du lobe temporal bilatéral en raison
de crises d'épilepsie fréquentes et incurables.
Après cette intervention, il fut atteint d'une amnésie
sévère antérograde: il ne pouvait se
souvenir d'événements ayant eu lieu cinq minutes
auparavant, bien que se souvenant de ceux d'un lointain
passé remontant à plusieurs années.
En revanche, H.M. possédait ses facultés de
raisonnement et de calcul, autrement dit sa "mémoire
procédurale". A partir de ce moment, la recherche
en neuroscience se focalisa en partie sur l'étude
de l'hippocampe, cette région du lobe temporal qui
joue un rôle aussi essentiel dans la mémorisation
et l'apprentissage, en particulier dans ce qu'on appelle
dans la "mémoire déclarative".

A gauche : localisation de l'hippocampe.
A droite : cellules de l'hippocampe vues au microscope,
montrant une disposition lamellaire
La disposition régulière
laminaire des cellules dans l'hippocampe est en faveur du
rôle de la géométrie du système,
et, par conséquent, de l'utilisation de la
théorie du champ à n niveaux. La seule
topologie est insuffisante pour décrire les potentiels
électriques enregistrés dans le tissu nerveux.
Les travaux menés en collaboration avec T.W. Berger,
dans le Programme de Neurosciences de l'Université
de Californie du Sud (USC) à Los Angeles ont permis
pour la première fois d'apporter une interprétation
mathématique à la réponse des cellules
des grains après une stimulation des voies perforantes
(extracellular field potential). Les propriétés
générales de l'organisation fonctionnelle
ont pu être vérifiées. Ce cas de transmission
monosynaptique fait intervenir la structure géométrique
représentée par les densités spatiales
des fibres de la voie perforante, les densités de
synapses entre les fibres et les cellules des grains, et
les densités de ces cellules.
La théorie du champ introduit de nouveaux paramètres
neuronaux qui décrivent, d'une part, les sources
à chaque niveau d'organisation, d'autre part la capacité
des neurones à modifier les variables de champ sous
influence externe et leur capacité à changer
d'état interne sous l'influence des variables de
champ, autrement dit, à un feedback du neurone sur
lui-même. Ces nouveaux paramètres ne peuvent
être exprimés en termes moléculaires,
comme les constantes de vitesse des réactions chimiques,
les "diamètres" des canaux, leur nombre,
etc. Même si cela peut sembler curieux à une
période scientifique du tout-moléculaire,
cela ne constitue pas un inconvénient, car ils expriment
quelque chose de différent, quelque chose de plus,
l'effet statistique de la population ou effet
de groupe, effet qui n'est pas réductible aux
individus de la population, quel que soit le niveau d'organisation
fonctionnelle considéré.
Puisque déduits de la théorie générale,
on obtient cet effet aussi bien pour les canaux, les synapses,
les neurones ou les groupes de neurones. Par exemple, c'est
un effet que l'on ne retrouve pas dans le potentiel créé
par un ou deux neurones. Ces nouveaux paramètres
constituent donc un moyen supplémentaire de caractériser
le comportement des populations constituées d'un
grand nombre d'éléments.